« Pas Son Genre », le joli film de Lucas Belvaux.

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Histoire:

Clément est un jeune professeur de philo affecté  à Arras pour un an. Ne sachant pas comment occuper son temps libre, il fait la connaissance de la sympathique Jennifer,  coiffeuse dans cette ville . Elle élève seule son fils, et adore chanter au karaoké le samedi soir avec ses copines. Elle est généreuse, entière, mais se méfie des hommes qui l’ont trop fait souffrir. Mais comme elle est « balance », et donc optimiste,  elle rêve toujours au prince charmant.

 Un jeune intello, et une petite coiffeuse, on a déjà vu ça dans « La dentellière » allez-vous me dire?

Le coup classique de la petite prolo et de l’intello bobo .

Toutefois, on trouve quelques variantes entre les deux films, car là ou Pomme, l’héroïne du film de Claude Goretta, était réservée à l’extrême, Jennifer est pétulante,vivante, primesautière, elle respire la joie de vivre.

Les grincheux reprocheront à ce film les stéréotypes de la coiffeuse provinciale et de l’intello parisien parfois un peu trop appuyés, mais au final on se laisse prendre par l’histoire d’amour entre Clément et Jenifer.

La rencontre entre ces deux là ne se fait pas tout de suite. On prend le temps de nous présenter l’univers de ces deux êtres si différents. Lui est un cérébral, un « intello parisien », et chez lui le célébral prend le pas sur tout le reste. Il considère les êtres, la vie et les sentiments avec froideur et détachement. Il passe d’une histoire à l’autre sans la moindre gène. Il a fait souffrir mais s’en moque totalement.

Pour lui , au début Jenifer n’est qu’un passe-temps pour tuer l’ennui de la province. On peut même penser qu’elle n’est qu’une idiote à cultiver ou un cobaye pour son prochain livre de philosophie.

Mais le film avançant, on se dit qu’il aime peut-être cette petite coiffeuse.

Ou bien est-ce nous qui avons envie de le croire ?

Une chose est sure, Jenifer fait tout pour ça, même si elle n’arrive pas à savoir si cet amour est réciproque, ce qui la fait souffrir.

Ce qui est évident, c’est que si cette jeune mère n’a pas le même niveau culturel, ni les mêmes goûts que Clément, elle n’en est pas moins intelligente.

Elle se met  à lire Kant avec un dictionnaire,  pour plaire à « Chaton ». Et lui de son coté fait quelques efforts en allant voir Jennifer Aniston au cinéma, et l’accompagne au karaoké où elle chante avec ses copines. Elle voudrait l’emmener plus loin, le faire participer à un karaoké sur la chanson d’Il était une fois, « J’ai encore rêvé d’elle ».

En ce qui concerne l’interprétation, on remarquera tout d’abord Loic Corbery de la Comédie Française, dans le rôle du jeune prof de philo, qui se montre  très crédible en amoureux dont on se demande toujours ce qu’il a dans la tête.  Mais sa performance, tout comme son personnage, est éclipsée par celle d’Emilie Dequenne,ici en blonde décolorée, qui se montre magistrale dans ce rôle de jeune coiffeuse saine, sympathique et surtout, très attachante. On est bluffé par sa façon de mener la danse, on est dans l’émotion à l’état pur .

Les dialogues sont aussi très bien écrits. Les scènes légères s’enchaînent avec celles, plus profondes, tout naturellement. Ce film n’a rien à voir avec les comédies romantiques à la française habituelle qui sont devenues totalement indigestes. Mais c’est peut-être parceque son réalisateur,Lucas Belvaux, est belge?

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Au delà du fait que ce jeune prof parisien a un problème avec ses sentiments, et s’il se pourrait qu’il soit plus attaché à cette petite coiffeuse qu’aux autres filles qu’il a connu auparavant, un autre blocage se produit en lui.

Ce blocage devient évident lorsqu’il croise par hasard sa collègue accompagné de son mari, et qu’il « oublie » de lui présenter Jenifer qui l’accompagne.

C’est à ce moment que notre pétillante coiffeuse comprend qu’ils ne pourront jamais s’aimer, qu’elle sera toujours la petite prolo provinciale qui ne lit qu’Anna Gavalda et connait par cœur la vie des stars.

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Doit-on voir dans le fait que Clément ne présente pas Jenifer à ses parents, à ses proches, qu’il a honte d’elle devant ceux de « son monde », le fait que les élites se tiennent de plus en plus éloignées des préoccupations de ceux qui sont la France d’en bas, comme le disait un ancien Premier Ministre.

Jenifer, c’est la France qui travaille, qui s’amuse, qui consomme, qui vit tout simplement. C’est à cette France là que ceux qui ne font qu’agir au travers de livres d’économistes demandent de faire des efforts en permanence.

Il fut une époque ou l’amour semblait impossible entre gens de couleurs ou de religions différentes, aujourd’hui ces barrières là sont tombées, mais il en reste encore une.

Pourquoi le racisme social est-il encore le seul qu’on refuse de combattre, ou plus grave, pourquoi semble-t-il prendre encore plus d’ampleur en période de crise?

En attendant la réponse, allez voir « Pas son genre ». Un joli film,à l’image de la kantienne Jenifer.

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6 commentaires pour « Pas Son Genre », le joli film de Lucas Belvaux.

  1. lacaufeu dit :

    Bonsoir Fatizo,
    Vu le film.
    La lumineuse Emilie Dequenne sous l’oeil de Lucas Belvaux est exceptionnelle et quelle belle voix. Les autres acteurs sont trés bons.
    Merci encore pour la suggestion.

    • fatizo dit :

      Ravi de voir que ce fil vous a plu aussi.
      En effet Emilie Dequenne crève l’écran, et comme vous le dites, en plus elle chante bien.
      Elle possède décidément tous les talents.
      Bonne soirée Lacaufeu

  2. cestnabum dit :

    Fatizo

    Décidément faire une vraie critique de cinéma est un art et vous en êtes le maître
    Je m’incline mon cher

    • fatizo dit :

      Pas le même genre, c’est tout. Mais pas de maître ici, juste une façon de voir différente.
      Bonne journée CNabum

  3. lacaufeu dit :

    Assurément Lucas Belvaux est un cineaste exigeant et souvent ses films en attestent….
    Bonne soirée.

    • fatizo dit :

      Il est sur que l’on aimerait voir un peu plus de cette « exigence » dans le cinéma français en général.
      Bonne journée

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